Ma mère m'a dit qu'elle en avait rien à foutre de moi. Mon père ? Je ne le connais pas. Il devait être en train de sauter quelques putes, comme d'habitude. À moins que ma mère en soit une aussi, ce qui ne m'étonnerait pas, à vrai dire. J'ai passé dix bonnes années en Finlande, y a rien là-bas sauf des tas de neige et des rues propres, enfin, en théorie. L'alcool coule à flots dès la nuit tombée, ce n'est pas une légende, et on aime picoler jusqu'au matin. J'ai commencé quand j'avais neuf ans, j'en ai piqué dans le bar à mon père qui était fermé à clé. Je l'ai défoncé avec un pied de biche que j'avais trouvé dans le garage, j'étais trop curieux. Tellement curieux que le pied de biche je l'ai reçu plusieurs fois dans le dos lorsque je me suis fait choper. M'enfin, c'était pas grand-chose. Les cicatrices que j'ai sont de véritables trophées incrustés dans ma chair.

Ensuite on a déménagé à Empire City, je sais pas pourquoi, mais elle était pressée la vieille. C'était de la famille qui s'était installée là-bas et elle avait l'intention de les rejoindre, je pense. À moins que ce ne soit qu'un amant rencontré sur internet. Ça m'étonnerait pas vu la connerie, elle serait tombée dans le panneau sans problèmes. Je ne l'ai jamais su mais pas mal de mecs tournaient. Enfin ils rentraient et ressortaient de la baraque. Déjà qu'on avait pas de place, il fallait que je me tape ces couilles molles. Ouais, ouais, j'ai été scolarisé, vous inquiétez pas pour ça. C'est sûr que ça ne m'aura servi à rien sauf à sauter des filles…plutôt bien roulées pour leur âge d'ailleurs. J'ai redoublé une fois, mon taux d'absentéisme était trop important. Apparemment j'avais manqué aux professeurs. Ils étaient allés chialer chez la principale et m'avaient forcé à revenir. En attendant, j'avais beau revenir dans leur collège merdique, je ne lâchais pas mes principales occupations. J'étais perturbateur et me foutait de tout, bien que j'assimilais les informations de chacun des cours, j'avais cette flemme de le remettre sur papier ou de répondre aux questions qu'on me posait. Je me suis fait tout seul, ça doit être ça.

Drogue, sexe, alcool, voitures…je me souviendrais toujours lorsque j'ai roulé pour la première fois sur une piste. Je devais avoir seize ans, c'était avec une Opel. Il y a eu de la casse à la fin mais j'étais plutôt heureux d'avoir roulé. Et j'ai renouvelé l'expérience plusieurs fois, jusqu'à me faire une réputation. Ma mère se foutait totalement de moi alors c'est l'un de mes professeurs qui est venu vers moi et m'a demandé ce que j'aimais. Je lui ai balancé tout ce que j'avais sur le cœur et il m'a dit qu'il pouvait m'aider à m'orienter. Je ne l'ai pas cru évidemment, à quoi vous pensiez ? Je ne sais pas ce qu'il a fait ce con mais un mec m'a contacté en disant qu'il avait besoin de moi. J'ai intégré l'armée pendant quatre ans. Dieu que c'était chaud, mais bordel qu'est-ce que je me suis éclaté à défoncer ces petites gueules d'apôtres à main nue !

Une fois sorti de là j'ai continué à rouler. C'est alors qu'un mec assez space est venu dans le squat que j'occupais pour me proposer un deal. J'ai accepté et j'ai commencé à livrer de la cocaïne en go fast entre le Mexique et les Etats-Unis. À chaque retour au squat j'ai dû virer pas mal de junkies à coup de pied au cul pour ne garder que les personnes qui me semblaient…"intéressantes". Ça s'appelle faire le tri, vous connaissez ? Puis j'ai enchaîné courses, livraisons…s'il y avait un mec à appeler pour faire passer des choses rapidement et discrètement, c'était bien moi. Et ça la plupart le savaient. Les hauts placés et les mafiosos également. J'ai été contacté par l'un d'eux il y a peu. Je devais aller à Casinopolis avec 3kg d'héro. Pas grand-chose, en soi. Mais un bon paquet de billets verts à la clé, alors j'ai sauté sur l'occasion. Une fois arrivé près du Stanford Airport j'ai dû attendre que le gusse se ramène. Mais il n'est jamais venu. Il m'a rappelé sur un autre numéro et m'a dit de garer la voiture ailleurs sous peine de se faire repérer. C'était près d'une centrale de je-ne-sais-quoi-encore, je me suis placé là-bas et j'ai attendu.

Pas très longtemps d'ailleurs puisque tout a pété. J'ai été soufflé comme beaucoup d'autres mais j'ai été sauvé grâce à ma position et le fait que j'étais resté dans la caisse. Lorsque je me suis réveillé, j'étais complètement différent. Ma peau était lisse, mes doigts étaient devenues griffes, mon corps était immense et j'avais au bout de ma colonne vertébrale une longue queue épineuse. Mes déplacements étaient étrangement fluides, hâtifs et précis. Un mec s'est pointé devant moi. Je ne sais pas ce qu'il m'a prit mais je lui ai sauté dessus. Je lui ai balancé ma queue dans la gueule en lui faisant exploser son crâne. Et j'ai bouffé sa cervelle avec un appétit qui me tiraille encore l'estomac…